Yves, diffusion du 02/09/20

Canal+
02/09/20 ~ 08:52 - 10:39

Contraint d’habiter dans le pavillon de banlieue de sa grand-mère, Yves rêve de percer dans le rap. Pour gagner un peu d'argent, il participe au test d'un frigo intelligent fourni gratuitement par la société Digital Cool. Le frigo intelligent commence par commander les courses, avant de se mettre à interférer de plus en plus dans son existence. Le rappeur n’apprécie pas du tout ces intrusions dans sa vie personnelle, et s’apprête à abandonner le test quand Yves améliore un rap de Jérem. En le propageant sur les réseaux sociaux, Yves fait une star de Jerem . Enivré par le succès, le rappeur va très vite se rendre compte que c’est son identité qui est en danger... - Critique : « On n’arrête pas le progrès » : ce genre de formule, Benoît Forgeard, drôle d’oiseau très haut perché qui avait signé Gaz de France en 2015, en tire des trésors d’absurde. Ainsi Jérem, rappeur au profil de loser sympathique, se voit-il livrer un jour un réfrigérateur intelligent… Yves, c’est son prénom, parle, échange, conseille, aide Jérem dans sa création musicale et en vient bientôt à prendre le contrôle de son existence. Le premier quart d’heure est irrésistible. Car le cinéaste fait du frigo, produit de l’électroménager on ne peut plus rudimentaire, un symbole presque chic et ­glamour de la révolution technologique. Cocasse mais aussi imaginatif, Yves ne se ­limite pas à la pochade ricanante. Il réserve des rebondissements féconds en croisant les genres (dystopie, farce, comédie romantique, film de hip-hop) pour ­atteindre une singularité dans la forme comme dans le fond. C’est en artisan que Benoît Forgeard façonne son univers délirant, à forte teneur sadomasochiste, où le langage est châtié du côté du robot et cru du côté de son propriétaire. William Lebghil est crédible en rappeur alternant mouise, gloire et décadence sous l’œil bienveillant de son manager (Philippe Katerine). Entre le despotisme d’une start-up high-tech, un procès retentissant (où l’appareil vient témoigner !) et une histoire d’amour tortueuse avec la machine, le film s’embourbe un peu parfois, mais sa loufoquerie poétique dépasse le discours sur les dangers de l’intelligence artificielle.