Les Troyens

Arte
31/01/19 ~ 22:50 - 02:55

Lassés des neuf années de guerre qui viennent de s'écouler, les Troyens se réjouissent du départ de leurs ennemis, les Grecs. Pourtant, ces derniers laissent derrière eux un étrange cheval de bois, qui ne manque pas d'intriguer Cassandre, fille de Priam, douée de la capacité de prédire l'avenir. Mais malgré l'annonce de la mort du prêtre Laocoon, qui affichait sa méfiance à l'égard de la statue équestre et qui vient d'être dévoré par de monstrueux serpents, personne ne prête attention aux pressentiments de la devineresse... Critique : La passion de Berlioz pour Virgile date de son adolescence : « Le poète latin fut le premier à trouver le chemin de mon cœur et enflammer mon imagination naissante. » Aussi, pour forcer les portes de l’opéra, surnommé « la grande boutique », se tourne-t-il vers un « sujet grandiose, magnifique et profondément éprouvant, ce qui prouve que les Parisiens le trouveraient fade et ennuyeux », la prise de Troie. Pressent-il son infortune ? De son vivant, Berlioz n’entendra pas Les Troyens montés en entier, mais de manière fragmentaire. A l’époque de Wagner et de Meyerbeer, on juge l’œuvre trop longue, trop alambiquée — un comble ! D’un classicisme français qui se rattache à Rameau et à Gluck, riche en trouvailles et en surprises sonores, « nulle part Berlioz ne s’applique à se montrer aussi sobre de rythmes et de structures , aussi sérieux de propos […] Les influences s’y sont sédimentées lentement, comme les gouttes de calcaire sur les stalactites d’une grotte. L’esprit du théâtre de Shakespeare y règne avec un naturel confondant […] Les aspirations les plus oniriques de Berlioz — ses rêves d’Orient, sa nostalgie des nuits africaines, au bord de la Méditerranée — s’y sont magnifiquement cristallisées », apprécie le chef John Eliot Gardiner. Alors, pour apprécier cette retransmission inaugurale de l’année Berlioz, suivons le conseil de Jean-Michel Brèque : « La tragédie se mérite […] et pour la recevoir il faut que nous aussi, spectateurs, chaussions cothurnes, en nous élevant un peu plus haut que notre ordinaire médiocrité (1). »   (1) Avant-scène opéra, n°128-129.