Le juge et le récidiviste

France 3
11/01/19 ~ 02:30 - 03:20

S'interrogeant sur le droit des récidivistes à se voir accorder une nouvelle chance, le réalisateur Stéphane Bentura a filmé pour la première fois le travail délicat d'une juge d'application des peines au Tribunal de Grande Instance de Bobigny. Ces magistrats ont la lourde responsabilité de remettre en liberté, avant la fin de leur peine, ceux qui ont commis un délit ou un crime. Ils vont ainsi à l'encontre d'une opinion publique très souvent méfiante à l'égard des récidivistes, considérés pour certains comme des individus qui pourraient à nouveau basculer dans la criminalité. En réalité, selon les études menées sur ce sujet, les permissions de sorties sont indispensables pour préparer la réinsertion, les délinquants récidivant deux fois moins après avoir bénéficié de ce traitement plutôt que de sorties «sèches». Critique : « Dysfonctionnements de la Justice », « laxisme des juges », « recul de l’autorité de l’Etat »… Régulièrement, des cas de récidive pointés par les médias soulèvent l’indignation de l’opinion publique, des politiques, et des forces de l’ordre. Partant de l’exemple d’un jeune policier grièvement blessé par un braqueur condamné, qui n’avait pas réintégré sa cellule après une permission, en octobre 2015, le documentariste Stéphane Bentura entreprend de dépasser l’émotion pour interroger le travail d’une juge d’application des peines du tribunal de grande instance de Bobigny. Fait rare, il a pu filmer les débats de deux commissions, l’une statuant sur les permissions de sortir, l’autre examinant en présence du détenu les demandes d’aménagement de peine (liberté conditionnelle, bracelet électronique…). Comment conjuguer le principe de la deuxième chance et l’évaluation du risque supporté par la société ? La question irrigue ce film, qui malgré une réalisation bancale et un propos assez redondant contredit judicieusement quelques idées reçues (notamment sur les chiffres de la récidive) et offre un intéressant renversement de perspective. Ces aménagements de peine si décriés, explique-t-il, sont aussi et surtout le gage d’une réinsertion sociale réussie… On reste, en revanche, très perplexe face à l’omission de la problématique, spécifique et hautement explosive, de la remise en liberté des délinquants sexuels.