Prénom : Rosemarie, diffusion du 25/08/20

Arte
25/08/20 ~ 00:50 - 02:30

Francfort-sur-le-Main, dans les années 1950. La séduisante Rosemarie Nitribitt vit dans un triste entresol avec deux amis chanteurs, désargentés comme elle. Aspirant à s'élever socialement sur fond de miracle économique allemand, la jeune femme use de ses charmes auprès d'hommes fortunés qu'elle repère dans les hôtels luxueux de la ville. A la suite d'un quiproquo, elle fait la connaissance de Hartog, un riche industriel marié, qui l'installe bientôt dans un petit appartement. Quand ce dernier la quitte, un Français, Fribert, la convainc de séduire d'autres membres du cartel d'entreprises auquel appartient Hartog, afin d'enregistrer leurs confidences sur l'oreiller pour les faire chanter... - Critique : | Genre : Satire au vitriol. Bien avant Fassbinder, d’autres cinéastes ont livré de féroces réquisitoires contre le miracle économique allemand de l’ère Adenauer — sa cupidité, son patriarcat rétrograde et son déni du passé nazi. En 1958, Rolf Thiele obtient même un immense succès de scandale avec cette Fille Rosemarie, inspiré librement des liens qu’entretenait la reine des prostituées de Francfort, Rosemarie Nitribitt, avec le gotha ouest-allemand conservateur, sur fond d’espionnage industriel et de chantage sexuel (à l’époque, avec des bandes magnétiques). Le film raconte l’ascension économique, sociale et tragique de cette Cosette d’après-guerre. En 1958, les femmes sont très minoritaires au volant. Rolf Thiele filme donc avec effronterie Rosemarie (Nadja Tiller, la plus célèbre actrice autrichienne de l’époque) foncer dans son cabriolet Mercedes. Ces provocations sont soulignées par les airs d’opérette de deux proxénètes, dans un style de cabaret brechtien (la musique est de Norbert Schultze, compositeur de Lili Marlene). De buildings en ascenseurs, la mise en scène très verticale départage ceux d’en haut et celle d’en bas et rappelle, avec ses bruitages exagérés, le burlesque de Tati. À la fois hilarant et poignant, voilà un film sacrilège qui a longtemps remué l’imaginaire populaire allemand. Il résume une époque où la satiété, le bonheur et la fortune étaient un dû.