Le ruban blanc, diffusion du 25/05/20
Dans un village allemand, juste avant la Première Guerre mondiale, des événements étranges se succèdent. Haneke étudie, encore, le mal à l'œuvre. Et le rigorisme moral qui mène au terrorisme… Brillant. Palme d'or 2009. - Critique : Il y avait eu ce câble tendu entre deux arbres. Il avait fait chuter le docteur, qui rentrait chez lui à cheval. Quelques semaines plus tard, il y avait eu le fils du riche propriétaire, roué de coups. Puis un bébé laissé devant une fenêtre ouverte, en plein hiver, et le gamin attardé de la sage-femme à qui on avait brûlé les yeux… Lent et somptueux, ce film étrange se déroule dans la pureté éclatante de paysages qui semblent inaccessibles à la noirceur. C’est une sorte de suspense permanent, où rien, à la fin, n’est révélé vraiment. Et aussi une réflexion sur des êtres frustrés, inexorablement poussés à la haine… Chez Haneke, le mal court toujours. Ce village allemand à la veille de la guerre de 1914-1918, qu’il a imaginé de A à Z, lui sert de laboratoire pour dénoncer tous les terrorismes. Il filme donc des êtres en enfer qui, pour s’y sentir moins seuls, y entraînent les autres. Que deviendront ces enfants brisés au nom de la morale ? Quand on les quitte, omniprésents et silencieux, ils ressemblent à un inquiétant chœur antique — comme les gamins blonds aux yeux vides d’un vieux film de SF en noir et blanc, Le Village des damnés. Une angoisse sourde naît de plans-séquences magnifiques où tout semble se jouer derrière des portes closes et des esprits verrouillés. Mais, sous l’apparente austérité, la fureur brûle. Haneke filme magistralement la noirceur qui s’infiltre dans les cœurs. D’où elle ne s’évadera plus.