Italie et mafia, un pacte sanglant, diffusion du 15/03/19

France 3
15/03/19 ~ 00:40 - 01:35

Pour la première fois, des magistrats, des politiques et des mafieux sous protection témoignent pour révéler les coulisses d'un pacte initié par les Etats-Unis au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Un pacte qui a permis à la démocratie chrétienne de dominer la scène politique italienne pendant plus de cinquante ans, et à la mafia de régenter l'ordre dans l'ombre. A la lumière de ces témoignages exclusifs, plus d'un demi-siècle de liaisons incestueuses entre l'Etat et la mafia se dévoilent et les morts des juges Falcone et Borsellino apparaissent de moins en moins comme une vendetta, et de plus en plus comme des crimes d'Etat. Critique : Le 23 mai 1992, l'escorte de trois voitures blindées qui conduit le juge antimafieux Giovanni Falcone de l'aéroport à Palerme explose : depuis une colline, les tueurs de la Mafia guettaient le cortège. Ils n'ont eu qu'à presser un bouton pour actionner 600 kilos de TNT qui ont pulvérisé le convoi. Le juge palermitain, sa femme, ainsi que trois de leurs gardes du corps sont tués. Quelques années après le « maxi-procès » de 1987, Falcone avait été le premier à comprendre qu'il existait une négociation secrète entre la Mafia et l'Etat. En traquant Cosa Nostra et son boss Toto Riina, Falcone s'attaquait de fait aussi à ceux qui leur garantissaient une immunité et une « couverture » : l'Etat et la Démocratie chrétienne. Deux mois plus tard, c'est au tour du juge Paolo Borsellino, qui avait pris la relève de Falcone, d'être exécuté, alors qu'il sonne à l'interphone de sa mère. 1992 est bien une année charnière, et le 23 mai, un jour où toute l'Italie s'est figée. Grâce à des interviews exceptionnelles de magistrats et de repentis sous protection (dont Gaspare Mutolo, ex-chauffeur de Toto Riina...), des reconstitutions minutieuses et des archives des procès et de l'enterrement de Falcone, Cécile Allegra et Mario Amura donnent une version complexe de la mort de ces juges antimafieux, victimes pas uniquement de vengeances, mais de crimes d'Etat, pour avoir mise au jour la collusion qui unissait le sommet de l'appareil italien, la Démocratie chrétienne et son leader Giulio Andreotti, aux boss de la Mafia. En outre, la partie 1994-2016, consacrée à Silvio Berlusconi, à ses « hommes » (Marcello Dell'Utri) et au procès dit « du pacte Etat-Mafia » de décembre 2013, explore de nouvelles pistes. Sur le fil, la tension ne baisse pas d'un cran, d'hypothèse en révélation. Surréaliste et édifiant. — Emmanuelle Skyvington